« Big Data ». Un maître mot, un savant mot. Partout il est sur la bouche et le bout des doigts d’un nombre de plus en plus important d’individus. Il regroupe tout et à peu près n’importe quoi, tant sa définition est vaste. Mais il est une réalité à étudier car de plus en plus présente dans nos vies, pour le meilleur et pour le pire. Sur un nombre croissant de sites de crédit en ligne, aux Etats-Unis, chacun peut souscrire à un prêt après avoir rempli en bonne et due forme un formulaire très rapide. Des formalités, comme l’adresse mail, le nom et le prénom, le lieu de résidence, etc. Mais ce que les individus qui remplissent le formulaire ignorent, c’est qu’à l’instant même où ils saisissent ses informations et les valident, une vraie machine de recherche se met en place. Si vous avez copié/collé votre mail, la vitesse à laquelle vous écrivez, le nombre de personnes financièrement solvables dans vos amis Facebook, sont autant d’informations collectées puis traitées par l’entité. Pour en déduire de votre propre solvabilité financière. Voilà une définition illustrée du Big Data, et en particulier de son traitement. Car le Big Data ne tire pas seulement de conclusions à partir d’un grand nombre d’éléments, il s’agit également d’un terme utilisé pour caractériser le nombre impressionnant de données disponibles sur des individus ou d’autres entités. Ce qui est propre à notre époque. Et par conséquent, devant cet abysse de matière, des nouvelles techniques sont mises en place afin d’en exploiter dument l’étendu des possibles. Pourquoi ce nombre impressionnant de données aujourd’hui ? 1.4 Milliards de Smartphones ont été vendu dans le monde en 2015. Les applications et les activités que nous effectuons sur nos téléphones nous demandent bien souvent de saisir certaines données personnelles, allant du clic le plus banal aux informations les plus intimes. Un like sur une publication, c’est une petite pierre de donnée supplémentaire qui peut être exploitée par une grosse entreprise de la Silicon Valley au Nord de la Suède. Un « ailleurs » existe donc bien, lieu où nos données se retrouvent, sont analysées afin de mettre au point de nouvelles méthodes de traitement. D’ailleurs, ces applications et sites que nous utilisons nous demandent une « autorisation » afin d’avoir accès à des listes amis, préférences, etc. Dans une majorité de cas, nous ne faisons pas attention à ce genre de choses, choses qui nous semble entrées dans le lieu commun, qu’est-ce qu’un simple like après tout ? Mais le Big Data commence bien là. Deux écoles existent alors face à la collection massive des données, et surtout leur utilisation. Une première école affirme que ce recours à l’analyse de nos données est un bien fondé car il permet de guider nos choix en fonction de nos désirs et de ce que nous apprécions. Ainsi plus besoin de faire nous même le tri, puisque il est déjà fait, on nous offre des bons choix au bon moment. Mais cette vision est réductrice, car orienter nos choix, c’est une chose, mais nous fermer inconsciemment à d’autres choix, ce qui est une privation de liberté en soi, n’est pas acceptable. L’autre école considère qu’un grand nombre de données sont acquises de manière étrange, qu’elles sont volées et utilisées à de mauvaises fins, ou à des fins qui nous échappent. L’Apple watch par exemple a été pointée du doigt un moment, en cause la peur de certains qu’on se serve de leurs données cardiaques et de santé en général, afin de les vendre par la suite à des compagnies d’assurance ou des banques, pour prévenir le risque lié à leurs clients. Avec cette omniscience du débat, Il n’est alors pas étonnant lorsque l’on arrive en première année d’école de commerce ou d’ingénieur en ayant des cours d’introduction et d’approfondissement de Big Data. Ce cours va bien souvent de pair avec un cours d’application de statistiques, qui permet d’illustrer les méthodes de traitement d’un grand nombre de données grâce à des modèle statistiques. Formation utile quand on sait que ces qualifications sont parmi les plus recherchées aujourd’hui par certaines grosses entreprises. Le Big Data est donc bien devenu Roi. Mais concentrons-nous un instant sur une partie du débat , la plus riche selon moi, qui caractérise un bon nombre de personnes inquiètent à propos de l’utilisation de leurs données, et la façon dont les entreprises intéressées procèdent J’ai eu l’occasion de lire un travail très intéressant de Dallas Walker Smythe, qui est un économiste Canadien, mais également un militant politique se rapportant au monde des médias. Audience Commodity and its work. Le point de vue de Smythe est plus qu’intéressant car il compare avec le lexique de l’idéologie marxiste notre rapport avec les média et notre rôle en tant qu’auditeur dans ce vaste monde. L’idée, simplifiée est que nous, peuple, travaillons sagement sans nous en apercevoir, en autorisant l’utilisation de données, en apposant des likes à tout va, pendant que nos données sont utilisées à des fins commerciales, sans que l’on aperçoive réellement le fruit de notre « travail ». Car oui, chers amis, nous travaillons pour d’autres quand nous utilisons toutes les heures nos téléphones portables. Il considère que nous sommes des « commodities ». Smythe va assez loin dans son raisonnement, en mettant en place tout un système, en définissant comment les publicitaires achètent l’audience que nous sommes, et quel prix nos actions peuvent rapporter. Ce que nous prenons pour un loisir en nous rendant régulièrement sur nos Smartphones, est en réalité un travail comme les autres. Et si l’on continue le débat en considérant cette activité comme un travail, tout peut alors être remis en question, à d’autres niveaux, politiques notamment. Qu’en est-il de la politisation de ce débat, de ce questionnement sans cesse renouvelé par certains ? Le 6 octobre 2015, la cour de justice de l’Union Européenne a suspendu le « Safe Harbor », qui était un accord qui encadrait l’utilisation des données des internautes d’Europe par certaines entreprises américaines (dont les multinationales de la Silicon Valley…). Pour quelle raison ? Un étudiant autrichien, Max Schrems, a déposé une plainte contre Facebook (au moment ou Snowden révélait l’existence du programme clandestin Prism). Ce programme permettait à certaines agences américaines de renseignement d’avoir accès aux données d’un grand nombre d’utilisateurs, les Européens en particulier. Et Max, à juste titre, pensait que cette action était une violation du droit de protection de ses données personnelles, protégées par des textes européens. La conséquence de ce débat aurait du tendre vers plus de conservation des données en Europe, et non plus à leur transfert vers les entreprises américaines. Au lieu de cela, début 2016, un nouvel accord de transfert automatique a été signé, de la même manière qu’avant la plainte, contre l’assurance par le directeur du renseignement américain de ne pas toucher aux données de masse. Les réactions à ce genou au sol se font encore attendre. Comment alors trouver un terrain d’entente ? Plusieurs idées ont été apportées, notamment en faveur de la monétisation de nos données en fonction du degré de leur importance pour ceux qui les exploitent (idée de Jaron Lanier, essayiste, compositeur, et ingénieur informatique américain, ayant notamment travaillé pour Columbia, dans son essai Who owns the future ?), ou encore de taxer en Europe, par exemple, les grosses entreprises américaines pour l’exploitation de nos données, en échange que les États taxant ces données nous reversent une partie de ces recettes supplémentaires, et ainsi puissent contribuer à de plus belles causes, dans les milieux de la santé ou encore de l’éducation.
Cessons donc de voir le Big Data et son utilisation comme ayant peu de conséquences directe sur nous, et acceptons l’idée que c’est un service rendu à certaines entreprises, qui mérite donc une contrepartie si il est exploité. Il faut donc pousser dans le sens de la politisation de ce débat, à l’échelle Européenne comme à l’échelle nationale. Nicolas Amsellem
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Juin 2017
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