![]() La France se ridiculise, voulant rompre les négociations de libre-échange UE - Etats-Unis.Et ce au nom d’arguments mensongers qui travestissent la réalité économique .N'y a-t-il plus personne pour défendre le libre-échange ? Le TTIP (Transatlantic Trade and Investment Partnership) est l'objet de tous les fantasmes et la cible de critiques quasi unanimes. Dans un sondage de juin dernier, deux tiers des Français souhaitaient mettre un terme à cette tentative folle de rendre le monde plus ouvert. Le gouvernement français, toujours soucieux de flatter l'opinion plutôt que de l'éclairer, a récemment annoncé la rupture des négociations, par le biais élégant d'un tweet (celui du secrétaire d'Etat au Commerce extérieur) ou d'une déclaration inopinée (celle de François Hollande à la conférence des ambassadeurs). L'opposition, fidèle à sa longue tradition protectionniste, s'est empressée de renchérir, en demandant de « nouvelles bases de discussions ». On ne trouve aujourd'hui, chez les politiques ou les éditorialistes, à peu près personne qui soutienne le TTIP, triste reflet d'une classe dirigeante intellectuellement lâche et économiquement analphabète. Inutile de mentionner les projections de croissance et d'emplois, immédiatement démenties par une myriade de blogueurs ; ni de rappeler la théorie des avantages comparatifs, puisque la mode est au made in France, auquel chaque candidat vient faire des génuflexions ; ni de préciser qu'il s'agit d'une négociation sans but préétabli où les partis peuvent s'entendre sur certains points et en laisser d'autres de côté ; ni de suggérer, face à l'objection récurrente de l'arbitrage, qu'il n'est pas anormal que les Etats doivent respecter les traités qu'ils ont signés ; ni d'invoquer la réputation de la France, risée de la diplomatie internationale avec ses airs de coq outragé et son incapacité à tenir parole (le fin du fin étant que la Commission semble décidée à passer outre le veto français) ; ni de décrire le mouvement mondial de régionalisation des accords de libre-échange, qui nécessite la formation d'une sorte de bloc occidental face aux grands émergents. Tout cela est totalement hors sujet face au spectre qui épouvante nos foyers : le boeuf aux hormones et autres poulets chlorés, conjointement invoqués par Attac et le Front national. Rarement opération de propagande fut aussi brillamment menée. De boeuf aux hormones, il n'a jamais été question, puisque le négociateur européen a répété qu'il n'en voulait pas et qu'il a amplement prouvé sa capacité à obtenir gain de cause sur ce sujet dans le cadre de l'OMC. Mais l'image a pris. Les experts de « l'art du simulacre », comme Platon décrit les sophistes, ont gagné la partie. En ces temps de circulation de l'information, il est fascinant de constater à quel point un mensonge bien tourné peut supplanter une vérité mal présentée : ce que les commentateurs américains appellent la politique post-vérité (« post-truth politics »). Tous les efforts de rectification de la Commission européenne sont et seront vains. Faut-il, comme l'intrépide avocat Hervé Guyader, s'épuiser en réfutations rationnelles ? Utilisons plutôt les armes de l'adversaire. Image pour image, j'en appelle à l'huître d'eau salée contre le boeuf aux hormones. Aujourd'hui, nos fiers ostréiculteurs, hérauts de la gastronomie française, peinent à exporter leurs produits. En effet, pour s'assurer de la bonne santé de l'huître, l'Union européenne exige de tester l'intérieur du coquillage, tandis que les Etats-Unis préfèrent analyser l'eau dans laquelle elles trempent. Deux méthodes que la communauté scientifique considère rigoureusement équivalentes du point de vue de la sécurité sanitaire. Du fait de ces traditions divergentes, nos fines de claire no 3 sont interdites de traversée de l'Atlantique. Ce que proposent les négociateurs du TTIP est de choisir l'une des méthodes ou de reconnaître les deux. Voilà tout ce que signifie l'expression maléfique d'« harmonisation des normes ». Nul doute que les restaurants new-yorkais se précipiteront sur les huîtres françaises, tandis que la réciproque reste à démontrer. C'est donc cela, la trahison du peuple ? Et l'on pourrait multiplier les exemples : caractéristiques des machines à crème pour les pâtisseries, mesure de consommation des appareils électriques, etc. On pleure à l'évocation par Saint-Simon du malheureux Vatel, maître d'hôtel du Grand Condé, qui mit fin à ses jours parce que, lors d'un grand festin donné en l'honneur de Louis XIV, les charrettes de poissons et d'huîtres n'étaient pas arrivées à temps. Espérons que ses successeurs, soutenus par le TTIP, auront plus de chance. Gaspard Koenig Dans les Echos
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Juin 2017
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