Depuis quelques mois le mot est sur toutes les bouches, « Brexit ». Il provoque crainte, incompréhension et stupeur chez les défenseurs de l’Europe tant les conséquences d’une sortie du Royaume-Unis de l’Union seraient grandes. Le "Brexit" est une abréviation de "British Exit", évoquant l'hypothèse d'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, faisant référence au "Grexit" évoqué durant l'été 2015 lors de la crise grecque. A la différence du "Grexit", où la mise à l'écart de la Grèce de la zone euro (et non de l'Union européenne) qui pouvait être envisagée comme une sanction envers le pays, il s'agirait dans le cadre du "Brexit" d'un départ volontaire de l'Union. Après des mois de négociations, un compromis sur le "statut spécial" du Royaume-Uni dans l'UE a été trouvé lors du Conseil européen des 18 et 19 février 2016. Le lendemain, le Premier ministre David Cameron a annoncé qu'un référendum sur cette question aura lieu le 23 juin 2016 et qu'il fera campagne pour que le pays reste dans l'UE à ces conditions. Les sources du Brexit L’opposition d’une partie de la classe politique Britannique à l’Union Européenne ne date pas d’hier, elle est en fait présente dès l’intégration de la Grande Bretagne à la CEE en 1970. L’Euroscepticisme prégnant du Royaume-Unis peut trouver son explication à travers cinq facteurs que sont la géographie, l’histoire, la politique, l’économie et les médias. L’insularité du Royaume-Uni et sa forte tradition maritime sont des éléments identitaires très forts qui poussent à la méfiance vis à vis d’une construction continentale hégémonique. Son histoire et sa résistance face à l’Allemagne nazie font que le pays n’a jamais éprouvé l’urgence de la construction d’une Europe Kantienne. Son économie ensuite, a toujours été tournée vers l’extérieur, ainsi avant son intégration à la CEE, la Grande-Bretagne échangeait plus avec le reste du monde qu’avec l’Europe. Plusieurs éléments peuvent s’ajouter à ces facteurs. Tout d’abord la montée d’une vague eurosceptique au sein des conservateurs. L’absence de débat autour de l’Union Européenne, source de divisions internes, a en effet permis à une branche eurosceptique de se créer au sein du parti. Mais c’est lors de sa campagne pour briguer un second mandat que le Premier ministre David Cameron a promis d'organiser, au plus tard en 2017, un référendum sur le maintien ou non du Royaume-Uni dans l'Union européenne : Promesse tenue. Le spectre du référendum est un levier politique pour le Royaume-Uni, visant à changer la direction prise par la construction européenne. Surtout c’est l’émergence du parti UKIP avec à sa tête Nigel Farage qui a remis la question sur le devant de la scène. Si l’ambition principale du parti est de quitter l’Union, ce dernier cristallise toutes les frustrations d’une frange de la population à travers un discours protectionniste et anti-immigration. Devenu troisième parti de Grande Bretagne suite aux dernières élections de 2015 il a largement libéré la parole autour du Brexit. Thème dont se sont emparés les médias Britanniques friands d’oppositions frontales. Il est d'ailleurs difficile de savoir si la presse nourrit l’euroscepticisme, ou si elle s’adapte à un euroscepticisme persistant des Britanniques, mais il est indéniable que la couverture négative de nombreux quotidiens influe sur le débat. Que veut le Royaume-Unis ? Le 15 novembre 2015, le gouvernement britannique a présenté quatre grandes exigences au président du Conseil européen, Donald Tusk. Ces exigences ont fait l'objet de longues heures de négociations lors du Conseil européen des 18 et 19 février 2016, à l'issue duquel un accord a été trouvé. Sur l’immigration et libre circulation des Européens : David Cameron a obtenu de pouvoir limiter certaines aides sociales pour les nouveaux migrants issus de l'UE selon une clause de sauvegarde de sept ans et une échelle graduelle. Sur la monnaie ensuite, le Premier ministre a obtenu que l'euro ne soit plus considéré comme la monnaie unique de l'UE mais le vocabulaire du texte reste vague sur ce point. Enfin sur la souveraineté des concessions ont également été faites. Cet accord vivement débattu au parlement Européen a suscité l’indignation de nombreux parlementaires, notamment ceux d’Europe de l’Est qui se voient directement visés dans la politique anti-migratoire du Royaume-Unis. Alors que Jean Claude Juncker se félicitait de ces avancées pensant qu’elles éviteraient un référendum, David Cameron annonça sa tenue dès le lendemain. Un Brexit est-il possible ? Le débat sur le Brexit a officiellement été lancé en Avril dernier. Très serrés, les sondages ne permettent pas d’identifier une tendance. Oscillant entre 42% et 43% le oui et le non sont au coude à coude, se sont surtout les indécis, au nombre de 12% qui décideront de l’issu de l’élection. De leur côté, les bookmakers estiment la probabilité de Brexit à environ 30%, le site de prévision hypermind lui donne une probabilité de 25%, et le Good Judgment Project 20%. Globalement donc le Brexit n'apparaît pas, à la date actuelle, comme l'issue la plus probable. Mais un accident est vite arrivé. D’un point de vue pratique, aucun pays n’a encore quitté l’Union Européenne. Avant l'entrée en application du Traité de Lisbonne le 1er décembre 2009, aucune disposition du traité ne précisait d’ailleurs expressément la possibilité pour un État membre de se retirer volontairement de l'UE. Le traité de 2004 établissant une constitution pour l'Europe a prévu que tout État membre peut se retirer volontairement de l'Union européenne. Cette disposition fut reprise intégralement dans le traité de Lisbonne en tant qu'article 50. Cet article formalise la procédure de retrait en établissant que chaque État membre peut notifier au Conseil européen son désir de se retirer. Une période de négociations s'entame alors entre l'État et le Conseil sur les modalités de séparation. Sans accord effectif dans les deux ans, les traités européens ne sont plus applicables à l'État, sauf si le Conseil européen décide à l'unanimité, en accord avec l'État membre, de proroger ces délais. Les États restants devront aussi négocier les impacts de ce départ sur les budgets, droits de vote et politiques européens. Quels seraient les conséquences d’un Brexit ?
La sortie de l’Union Européenne inquiète tout particulièrement les milieux économiques. Ainsi dès 2015, l’agence Standard and Poors a revu à la baisse sa notation de le Grande Bretagne dégradant sa perspective de « stable » à « négatif » expliquant le danger que représentait la perspective d’une sortie de l’UE pour la Grande Bretagne. De nombreuses études sont sorties sur le sujet, montrant presque unanimement qu’une sortie de l’UE pour la Grande Bretagne aurait des conséquences désastreuses pour le pays. Mais c’est surtout le rapport du Trésor Britannique qui fait référence. Ce dernier affirme qu’une sortie de l’UE provoquerait une récession pendant un an, sur deux ans la croissance du PIB serait réduite de 3,6% par rapport à ce qu’elle aurait été en restant dans l’UE, 500 000 emplois seraient perdus, la livre sterling baisserait de 12 %, les prix immobiliers de 10 % et les salaires réels moyens reculeraient de 3 %. Et pourtant il s’agit là du scénario « optimiste » élaboré par le trésor, le pire scénario tablant sur un recul de 6% du PIB et la destruction de 800 000 emplois. D'un autre côté, le contrecoup d’un Brexit serait réel pour l’Union Européenne. La sortie de la Grande Bretagne pourrait marquer le début d’une dislocation de l’Union réduisant le projet fédéraliste à néant. Il serait aussi la preuve d’une défiance certaine des opinions publiques envers le projet Européen qui depuis la crise fait figure de bouc émissaire pour de nombreux gouvernements nationaux. Sur la scène internationale aussi, le coût serait élevé pour l’union. Sa pertinence en tant que bloc face aux grands partenaires serait remise en cause et son exemplarité en terme d’intégration mise à mal. Jean Claude Juncker a également souligné à de nombreuses reprises le péril que représenterait une sortie de l’Union, affirmant en Avril lors d’un sommet en Allemagne que « la sortie de l’union aurait des conséquences que l’on ne peut imaginer »1. Ce dernier est d’ailleurs ouvertement engagé dans un bras de fer avec l’ancien maire de Londres Boris Johnson. Cependant, le Brexitqui pourrait avoir un certain nombre de retombées positives pour l’union. En remettant en question le modèle de construction actuelle, le Brexit pourrait pousser à une nouvelle réflexion pour déterminer l’avenir de l’union.
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Juin 2017
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