Le moins que l’on puisse dire c’est qu’un an après la situation n’est pas vraiment glorieuse. Les attentats dans ce qu’ils ont de plus horrible ont tendance à souder et à unir un peuple. Cela a bien été le cas à la suite des attentats qui ont agité l’année 2015. Le seul vrai problème c’est que la classe politique ne suit pas derrière.
Hollande en fin stratège politique montre bien qu’il n’est pas devenu président de la République pour rien. Dans un mélange de cynisme et d’habileté politique il propose une réforme constitutionnelle proposant des mesures, dont notamment la déchéance de la nationalité, totalement contraire à ses convictions. En politique politicienne on appelle ça du génie mais ça manque tout de même de sincérité et de cohérence. Pendant que Sarkozy cours après l’extrême droite sur les idées d’identité et d’immigration, que l’extrême-gauche et les verts s’effondrent parce que les Français ne sont pas du tout stupides sur le long terme et qu’ils comprennent qu’ils ne servent à rien, Hollande court après les voies du centre-droit. Sachant qu’il n’aura pas besoin d’aller affronter des adversaires lors d’une primaire ouverte portée par son autorité présidentielle, il sait d’ores et déjà que les voix de l’extrême-gauche jusqu’au centre-gauche lui sont d’emblée acquise. En faisant avaler couleuvre sur couleuvre à ses camarades de gauche, il se donne aussi l’image du président qui voit plus loin que ses convictions politiques. En fait Hollande fait du Sarkozy à l’envers et en beaucoup mieux. Lors de son élection en 2007, Sarkozy avait remis au gout du jour une pratique de Francois Mitterrand : nommer des personnalités politiques qui ne viennent pas de son camp dans son gouvernement. Ainsi, plusieurs personnalités de gauche ont eu des postes ministériels tels que Bernard Kouchner au Quai d’Orsay ou encore Éric Besson, ministre de l’immigration puis de l’industrie. Le seul hic, c’est qu’il avait pris des personnalités de gauche qui n’apportaient rien d’eux-mêmes, ils appliquaient à la lettre sa volonté politique. La stratégie de Francois Hollande est beaucoup plus fine. Il compose dans son gouvernement avec des personnalités qui se disent de gauche mais qui appliquent plutôt dans les discours et un peu moins dans les actes une politique de centre-droit. Cela peut sonner un peu faux mais cela sonne beaucoup moins faux que la façon dont Sarkozy faisait de la politique à l’époque de sa présidence. Le pari de Francois Hollande est que Sarkozy va gagner la primaire chez Les Républicains. Si tel est le cas, sa course aux voix de l’extrême-droite avec ses thèmes de l’identité et de l’immigration échouera car les Français ont vu que les actes n’ont pas suivi la parole sur la période 2007-2012 et préfèreront l’original à la copie en votant Marine Le Pen. Dans ce contexte on peut très bien imaginer un second tour Hollande-Le Pen où Hollande serait réélu mais pas aussi largement que Chirac en 2002. La bonne nouvelle dans tout ça c’est que malgré ce cynisme le système politique français pourrait en bénéficier. Avec la montée du FN, et la décadence d'une certaine gauche complaisante à l’égard de l’islamisme radical et complètement datée sur les questions économiques et sociales, on pourrait assister à une recomposition politique de notre pays. Tout ceci est tranquillement en train de se mettre en place avec la main tendue de Raffarin au gouvernement pour créer une grande coalition contre le chômage, ou encore la visite d’Hollande à Xavier Bertrand suite à sa victoire aux régionales dans le Nord. Macron est le parfait exemple que la droite et la gauche peuvent travailler ensemble sur les questions économiques et sociales. Au fond, dans les idées et les discours, ce qui sépare actuellement la droite et la gauche se situent sur les questions sociétales comme le mariage pour tous. Et si le cynisme et l’intérêt général pouvaient se rejoindre ? Pour achever le chef d’œuvre après tout il ne manque plus que l’organisation d’un référendum mettant en place la proportionnelle intégrale lors des élections législatives. Une fois voté, un tel référendum empêcherait la constitution d’une majorité se fondant sur les partis à l’assemblée nationale à cause des probables 100 sièges qu’aurait le FN. La seule possibilité serait alors la constitution d’une majorité d’idées allant du centre-gauche au centre-droit avec un consensus sur des grandes questions. En gros, le fantasme de Francois Bayrou réalise, un gouvernement composé d’une dream team des meilleurs personnalités politiques des deux partis et un président de la République qui arbitrerait les gros désaccords. Cela ne marche pas trop mal en Allemagne et les Français en ont marre des oppositions stériles. Cela permettrait aussi de donner le vrai pouvoir politique au FN dans les institutions coupant court à leurs arguments victimaires sur leur sous-représentation dans les institutions démocratiques par rapport à leur poids électoral. La seule vraie menace pour Hollande ? Le renouveau, le vrai. En effet, compte tenu du nouveau paysage politique français, Hollande arrive à ringardiser Sarkozy qui est de plus en plus inaudible comme les récents sondages l’attestent. Juppé ? Il a 70 ans, et les 18-25 ans qui constituent le groupe chez qui l’abstention est la plus forte n’étaient pas nés au moment où il était ministre sous Mitterrand ou même premier ministre sous Chirac. Il a beau être le chouchou des sondages, c’était aussi le cas de Balladur avant l’élection de présidentiel de 1995 et il avait pourtant perdu à l’époque. Les vrais dangers pour Hollande se nomment Macron, Bruno Le Maire et NKM. Ils sont tous les trois jeunes, brillants, charismatiques, ils n’hésitent pas à afficher des convictions à contre-courant de leur camp politique sans que cela ne paraisse pour de la politique politicienne. En résumé ils incarnent le renouveau qu’attendent les français. Macron ? Peu probable qu’il y aille même si cela ferait du bien au pays et surtout au débat démocratique. NKM ? Trop faible politiquement dans son camp pour qu’elle gagne les primaires. Bruno Le Maire est un sérieux outsider mais il est peu probable qu’il gagne les primaires à droite. Les instituts de sondage nous rendrait bien service à tester des hypothèses de score de Macron et Le Maire à la présidentielle plutôt que ceux de Sarkozy, Juppé, Valls et Hollande. En faisant cela en 2005 et 2006 ils avaient fait émerger Segolene Royal qui avait écrasé les éléphants Fabius et DSK en 2007. Hollande est aussi et surtout un génie qui s’appuie sur des institutions taillées sur mesure pour éviter que des menaces comme Le Maire et Macron ne le balayent. Sauf si le courage politique arrive à l’emporter sur la force des institutions. Mais ceci est sûrement un autre sujet. Emmanuel Attias
1 Commentaire
Olivier
1/7/2016 09:16:59 am
Très bon article ! Une analyse fine d'un phénomène qu'on peut résumer plus simplement par : "l'échiquier politique a globalement basculé vers la droite."
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Juin 2017
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